@Nemrod : oh,
je soulignais plus le paradoxe de fond...
@Altern :
1/ Curieusement, d'accord avec ta conclusion :
Altern a écrit: " pour qu'une solidarité soit efficace, elle doit être limitée dans
l'espace et limitée dans le temps. Cela augmente aussi la probabilité de
réciprocité effective. Sinon elle sera mécaniquement trop faible et
trop diffuse
Ce qui revient à dire que puisque l'on ne peut pas être solidaire de tout le monde, il y a une maximisation sous contrainte à opérer :-)
2/ D'accord aussi avec l'idée, assez intuitive, et lié à la précédente, que la solidarité sera a priori proportionnelle au degré de proximité que l'on a avec les gens ; on sera d'abord solidaire de ses enfants avant de l'être de gens qu'on ne connaît pas.
D'accord donc sur ce point, mais l'expérience montre que les choses sont parfois plus complexes. Un bon exemple : les gens sont prêt à se mobiliser contre la faim à l'autre bout du monde, ou pour des mineurs coincés dans leur mine de l'autre côté de l'océan, mais peuvent laisser mourir un parent âgé en situation de dépendance sans aller le voir, ou marcher par inadvertance sur le clochard du coin qu'ils croisent pourtant tous les matins.
En essayant de ne pas tirer de cela un jugement de valeur, je suppose que l'on peut au moins, à partir de ça, enfoncer une porte ouverte : notre tendance à la solidarité n'est pas le pur fruit d'une démarche volontaire et rationnelle, mais dépend d'autres facteurs personnels (émotions, idiosyncrasies) ou extérieurs (notamment : soudaineté et/ou ponctualité du besoin de solidarité exprimé, médiatisation).
3/ pas complètement d'accord en revanche avec ceci :
Altern a écrit:Je pense qu'en cas de coup dur (et même avant), il est très important d'en revenir à un système de "Clan".
(...)
Ceci afin d'avoir un réseau qui pourra appliquer une solidarité limitée mais efficace à ses membres."
Cela revient à assimiler le "clan" au "réseau" ; on peut ( "les mots n'ont pas de sens, ils n'ont que des usages") ; mais cela me dérange un peu. Comme tu le soulignes d'ailleurs, une réseau se défini par le "lien lâche" (cf. les analyses de Graenovetter). Or, sauf erreur de ma part, le lien "clanique" - au sens que l'on donne usuellement à ce mot est assez fort :
(a) parce qu'il ne repose pas que sur la confiance mais sur des données perçues comme "objectives" (famille, ancêtre commun, conception du monde ou vie spirituelle commune etc. cf. http://www.cnrtl.fr/definition/clanique, mais on doit pouvoir faire mieux) ;
(b) et surtout, parce que la notion de clan est politiquement exclusive : un clan repose sur une distinction ami-ennemi
. Un clan, c'est potentiellement politique, parce que ça porte en soi la possibilité de la lutte physique.
Là où je te rejoins, c'est que nous sommes plus dans une société du réseau que dans une société du clan :
Altern a écrit: chacun des membres de ce réseau peut lui-même faire partie d'un autre réseau : c'est la notion de maillage."
Avec ce corrélat que oui, le lien est lâche : puisqu'il y a plein de gens dans le caniveau alors que, comme tu dis : "si chacun s'occupait de ses proches et les soutenait en cas de difficulté, l'inévitable tissus de relations humaines ferait que très très peu de personnes resteraient dans le caniveau"...
Je veux bien essayer d'être optimiste et penser que le "réseau" est un "dépassement" des limites égoistes du clan, mais...
euh, non, je n'y arrive pas.
En résumé, là où je veux en venir, c'est qu'à mon sens :
- la société clanique et la société de réseau reposent sur des principes opposées ;
- la société clanique est sans doute plus porteuse pour "la survie" en général ;
- d'accord avec vous pour dire que la solidarité clanique est sans doute nécessaire aujourd'hui ;
- mais elle ne me paraît pas bien facile à construire
... parce que nous sommes dans une société individualiste où les gens préfèrent se définir par leur différence que par une allégeance collective dominante.
amicalement
fx