Petit résumé de ma nuit de vendredi soir, qui fut ma première nuit "dehors" depuis longtemps.
A l’origine, nous avions prévu d'établir notre bivouac dans une forêt près de Nancy, mais pour différentes raisons, notamment une pluie incessante et le fait qu'une des personnes présentes devait être a son travail le lendemain a 10h, nous avons opté pour un terrain privé situé dans l'Est de la Moselle. Les indications sont volontairement très vagues, le propriétaire du terrain a déjà eu plusieurs dégradations sur sa propriété, il ne souhaite pas que son terrain soit identifiable. C'est pourquoi, malheureusement, je ne peux pas partager de photo ici. Malgré cela, je vais essayer de partager avec vous mes impressions de cette nuit atypique.
Nous sommes donc arrivés sur place a 19h, et la première tâche fut de localiser la casemate. Une casemate est un abri fortifié en béton, faisant partie de la Ligne Maginot, une ligne de défense construite de 1928 a 1940 le long des frontières, du nord au sud de la France. Cette ligne Maginot comporte plusieurs sortes d'ouvrages : des très importants, comprenant plusieurs étages et des dizaines de kilomètres de galeries jusqu'aux blockhaus MOM qui n'étaient qu'une seule pièce de 10m² sans sous sol.
Notre casemate est de taille moyenne et ressemble d'extérieur a celle ci: Elle comprend une dizaine de pièces, sur deux niveaux. Ce n'est pas un musée, le propriétaire des lieux la garde telle quelle pour le moment et la rénovera peut être a sa retraite. Elle est simplement vide et fermée. Imaginez-vous donc arriver devant ce bloc de béton gris, pris dans la végétation, a la nuit tombée et sous une pluie battante. Ambiance ! La lourde porte d'époque est verrouillée mais nous avons la clé. Au prix de quelques efforts, la porte finit par s'ouvrir. La casemate est presque vide, a part une pièce qui comprend l'ancien système de filtration et quelques énormes filtres a air figés dans la rouille. Aux murs, au sol, au plafond.. du béton, de l'acier et de la rouille. C'est froid, c'est humide et c'est triste a mourir.. mais par chance, l'une des chambres de tir, là ou il y avait le canon et les mitrailleuses il y a bien longtemps, est épargné par l'humidité et la rouille.
L'un de mes amis présents, ami lui-même du propriétaire des lieux, est un passionné des vestiges militaires de notre région et nous fait la visite guidée, assortie de l'histoire de ce bâtiment. On voit l’emplacement des jumelages de mitrailleuses, du canon, les rails suspendus au plafond qui servaient a déplacer ces lourdes armes, l'emplacement de la cuisine, des wc, la chambre de l'officier et celle de la troupe accueillant a l'époque un peu plus d'une vingtaine d'hommes -qui se partageaient 8 lits... par roulement-, quelques sommiers métalliques, les deux citernes d'eau bétonnées. A l'époque de leur construction, ces installations étaient a la pointe de la technologie : cuisinière électrique, moteur produisant l'énergie nécessaire a l'éclairage, au chauffage et a la filtration de l'air, en cas d'attaque au gaz. Malgré l'état de délabrement de la casemate, on peut encore lire des inscriptions d'époque sur les portes et les murs: indications pour vider une citerne, interdictions aux "non -spécialistes" d’accéder a la salle du moteur, les mots "chambre de tir", "chambre des Officiers", "Centre de communication"... A la lumière de nos frontales, on replonge dans la vie de ces soldats, terrés dans ces murs en béton, l’œil rivé au périscope ou derrière les instruments de visée de leurs armes. Dans les gros ouvrages, certains déprimeront, usés par l'état d'alerte quotidien, l'absence de lumière du jour et le rythme des "quarts" (repos/ travaux d'entretien/ manœuvre/ garde et corvées) Ils nommeront cet état de déprime: la "betonnite".
Notre diner fut constitué de pain frais, de saucisson paysan, d'un cassoulet chauffé au feu de bois a l'extérieur et d'une bière régionale. Au vu de la pluie battante, le feu ne s'est pas fait sans mal... Nous avons écorcé du bois mort, et monté un petit abri avec un tarp pour le protéger. Si j'avais été seul, j'aurais probablement fait mon feu a l'intérieur, dans le couloir d'entrée, l’arrivée d'air et plusieurs ouvertures m’auraient, je pense, garanti un bon tirage et une évacuation sans problème de la fumée. Mais par respect du lieu, nous ne voulions pas risquer de laisser des traces de feu sur le sol intérieur.
Pour le couchage, nous sommes trois installés au sol, et notre "guide" opta lui pour le hamac suspendu. Cela peut paraitre original vu le lieu, mais il n'en est rien : dans plusieurs ouvrages de la ligne Maginot, les soldats dormaient a l'époque dans des hamacs, comme sur les navires de guerre. Cela permettait de tout ranger la journée, et ainsi d'avoir une salle pour manger. Économie de place... Pour nous, au sol, le principal ennemi est le froid, et avec lui le béton, véritable "pompe de chaleur". Je place donc mon poncho -très épais, il s'agit du modèle de surplus de l'armée allemande... du lourd, loin du matériel "ultra leger" ^^ - puis je place une space blanket et enfin mon sac de couchage.
Après quelques récits historiques et anecdotes d'urbex, nous nous glissons dans nos sacs de couchage. Et je dois bien avouer que ce n'est pas la nuit la plus confortable que j'ai passée: la dureté du sol ne me dérange pas mais le froid finit par remonter dans le sac et me réveille vers 3h. Je prends ma veste et l'étale sous mon sac de couchage et je fais de même avec ma polaire et mes habits de rechange mais dans mon couchage. Là je suis enfin au chaud et je termine ma nuit tranquillement. A mon réveil, mes vêtements sont chauds, ce qui est assez agréable!
A 8h, nous prenons un café avant de remballer et de refermer la casemate derrière nous. A la lumière du jour, nous découvrons le petit bois, qui accueillera surement l'une de nos prochaines sorties et, malgré la pluie qui n'en finit pas, une belle vue sur les champs et le village voisin.
Aujourd’hui, je viens de ranger et nettoyer mon matériel, et de partager ma modeste aventure avec vous. C'est très loin des magnifiques paysages Suédois, Québécois, et de la verdoyante campagne Belge ou Française, mais je ne regrette pas cette plongée dans l'histoire de ma région.
A l’origine, nous avions prévu d'établir notre bivouac dans une forêt près de Nancy, mais pour différentes raisons, notamment une pluie incessante et le fait qu'une des personnes présentes devait être a son travail le lendemain a 10h, nous avons opté pour un terrain privé situé dans l'Est de la Moselle. Les indications sont volontairement très vagues, le propriétaire du terrain a déjà eu plusieurs dégradations sur sa propriété, il ne souhaite pas que son terrain soit identifiable. C'est pourquoi, malheureusement, je ne peux pas partager de photo ici. Malgré cela, je vais essayer de partager avec vous mes impressions de cette nuit atypique.
Nous sommes donc arrivés sur place a 19h, et la première tâche fut de localiser la casemate. Une casemate est un abri fortifié en béton, faisant partie de la Ligne Maginot, une ligne de défense construite de 1928 a 1940 le long des frontières, du nord au sud de la France. Cette ligne Maginot comporte plusieurs sortes d'ouvrages : des très importants, comprenant plusieurs étages et des dizaines de kilomètres de galeries jusqu'aux blockhaus MOM qui n'étaient qu'une seule pièce de 10m² sans sous sol.
Notre casemate est de taille moyenne et ressemble d'extérieur a celle ci: Elle comprend une dizaine de pièces, sur deux niveaux. Ce n'est pas un musée, le propriétaire des lieux la garde telle quelle pour le moment et la rénovera peut être a sa retraite. Elle est simplement vide et fermée. Imaginez-vous donc arriver devant ce bloc de béton gris, pris dans la végétation, a la nuit tombée et sous une pluie battante. Ambiance ! La lourde porte d'époque est verrouillée mais nous avons la clé. Au prix de quelques efforts, la porte finit par s'ouvrir. La casemate est presque vide, a part une pièce qui comprend l'ancien système de filtration et quelques énormes filtres a air figés dans la rouille. Aux murs, au sol, au plafond.. du béton, de l'acier et de la rouille. C'est froid, c'est humide et c'est triste a mourir.. mais par chance, l'une des chambres de tir, là ou il y avait le canon et les mitrailleuses il y a bien longtemps, est épargné par l'humidité et la rouille.
L'un de mes amis présents, ami lui-même du propriétaire des lieux, est un passionné des vestiges militaires de notre région et nous fait la visite guidée, assortie de l'histoire de ce bâtiment. On voit l’emplacement des jumelages de mitrailleuses, du canon, les rails suspendus au plafond qui servaient a déplacer ces lourdes armes, l'emplacement de la cuisine, des wc, la chambre de l'officier et celle de la troupe accueillant a l'époque un peu plus d'une vingtaine d'hommes -qui se partageaient 8 lits... par roulement-, quelques sommiers métalliques, les deux citernes d'eau bétonnées. A l'époque de leur construction, ces installations étaient a la pointe de la technologie : cuisinière électrique, moteur produisant l'énergie nécessaire a l'éclairage, au chauffage et a la filtration de l'air, en cas d'attaque au gaz. Malgré l'état de délabrement de la casemate, on peut encore lire des inscriptions d'époque sur les portes et les murs: indications pour vider une citerne, interdictions aux "non -spécialistes" d’accéder a la salle du moteur, les mots "chambre de tir", "chambre des Officiers", "Centre de communication"... A la lumière de nos frontales, on replonge dans la vie de ces soldats, terrés dans ces murs en béton, l’œil rivé au périscope ou derrière les instruments de visée de leurs armes. Dans les gros ouvrages, certains déprimeront, usés par l'état d'alerte quotidien, l'absence de lumière du jour et le rythme des "quarts" (repos/ travaux d'entretien/ manœuvre/ garde et corvées) Ils nommeront cet état de déprime: la "betonnite".
Notre diner fut constitué de pain frais, de saucisson paysan, d'un cassoulet chauffé au feu de bois a l'extérieur et d'une bière régionale. Au vu de la pluie battante, le feu ne s'est pas fait sans mal... Nous avons écorcé du bois mort, et monté un petit abri avec un tarp pour le protéger. Si j'avais été seul, j'aurais probablement fait mon feu a l'intérieur, dans le couloir d'entrée, l’arrivée d'air et plusieurs ouvertures m’auraient, je pense, garanti un bon tirage et une évacuation sans problème de la fumée. Mais par respect du lieu, nous ne voulions pas risquer de laisser des traces de feu sur le sol intérieur.
Pour le couchage, nous sommes trois installés au sol, et notre "guide" opta lui pour le hamac suspendu. Cela peut paraitre original vu le lieu, mais il n'en est rien : dans plusieurs ouvrages de la ligne Maginot, les soldats dormaient a l'époque dans des hamacs, comme sur les navires de guerre. Cela permettait de tout ranger la journée, et ainsi d'avoir une salle pour manger. Économie de place... Pour nous, au sol, le principal ennemi est le froid, et avec lui le béton, véritable "pompe de chaleur". Je place donc mon poncho -très épais, il s'agit du modèle de surplus de l'armée allemande... du lourd, loin du matériel "ultra leger" ^^ - puis je place une space blanket et enfin mon sac de couchage.
Après quelques récits historiques et anecdotes d'urbex, nous nous glissons dans nos sacs de couchage. Et je dois bien avouer que ce n'est pas la nuit la plus confortable que j'ai passée: la dureté du sol ne me dérange pas mais le froid finit par remonter dans le sac et me réveille vers 3h. Je prends ma veste et l'étale sous mon sac de couchage et je fais de même avec ma polaire et mes habits de rechange mais dans mon couchage. Là je suis enfin au chaud et je termine ma nuit tranquillement. A mon réveil, mes vêtements sont chauds, ce qui est assez agréable!
A 8h, nous prenons un café avant de remballer et de refermer la casemate derrière nous. A la lumière du jour, nous découvrons le petit bois, qui accueillera surement l'une de nos prochaines sorties et, malgré la pluie qui n'en finit pas, une belle vue sur les champs et le village voisin.
Aujourd’hui, je viens de ranger et nettoyer mon matériel, et de partager ma modeste aventure avec vous. C'est très loin des magnifiques paysages Suédois, Québécois, et de la verdoyante campagne Belge ou Française, mais je ne regrette pas cette plongée dans l'histoire de ma région.