Salut à tous !
Cela faisait assez longtemps que je voulais poster un petit article sur les similitudes entre Urbex et situation de survie urbaine.
Qu'est-ce que l'Urbex ?
C'est le diminutif de Urban Exploration, l'exploration urbaine.
Il ne s'agit pas d'arpenter les villes en tongues, mais plutôt d'explorer les lieux abandonnés de notre civilisation. Les endroits à découvrir sont appelés "spots".
Il y a plusieurs motivations, je vais donner quelques unes des miennes :
- Il y a un énorme aspect historique. La plupart des lieux que j'ai visités sont chargés d'histoires. Que ce soient des hauts fourneaux métallurgiques de début 1900, des centres de traitement des tuberculeux en montagne, ou d'époustouflants manoirs du 19e, chacun a une âme, en aillant accueilli toutes sortes de personnes.
Exemple avec cette petite chapelle :
ou une partie de machinerie :
Ces lieux sont abandonnés, mais souvent très bien conservés tant qu'ils restent dans le secret. Ce sont donc presque des musées à ciel ouverts, perdus dans la nature. A ceci près qu'il ne s'agit pas d'une reconstitution, mais bien de lieux réels, authentiques, et abandonnés en l'état.
De nombreux spots ont ainsi été complètement figés à l'époque de leur abandon. Il n'est pas rare de trouver une pièce avec une atmosphère années 50, une salle du 19e tant sur les meubles, la tapisserie, voire quelques livres, des photos, ou même des écrits personnels !
- Les photos. J'apprécie les lieux anciens, par leur architecture, leurs matières (il y a peu de béton industriel), et leur façon de vieillir. Il y a parfois une atmosphère post-apo qui s'en dégage, dans le sens où il y a une complète liberté de déplacement, sans jugement de quiconque. Vous pouvez vous dire "Tiens, j'aimerais bien monter dans cette tour !" puis le faire la seconde d'après alors qu'en lieu civilisé votre envie restera imaginaire.
Certains apprécient les paysages naturels (moi aussi, hein), d'autres l'aspect rouillé, ou encore suivent le questionnement "Que reste-t-il de notre monde lorsque la nature reprend ses droits ?".
Les Urbexeur ont souvent une mauvaise image, car on les assimile à la dégradation, c'est faux pour ceux qui respectent une éthique communément admise : Il ne faut en aucun cas transformer le lieu, voler quelque chose, ou détruire ne serai-ce qu'un meuble ou une porte.
Ils ont en revanche pas mal d'homologues "explorateurs" qui s'en distinguent :
- les airsofteurs, qui trouvent dans les lieux abandonnés à la fois un terrain de jeu relativement "réel", et la tranquillité requise pour la journée.
La plupart du temps, cela se passe bien quand on se croise. De temps et temps, ils se montrent très dangereux car "on empiète sur leur terrain" (phrase véridique), et n'hésitent pas à orienter quelques tirs (sans protection) vers les urbexeurs pour les décourager d'approcher, j'ai eu un beau bleu dans le cou, et ça a été assez pénible de discuter après sans en venir aux mains.
- Les graffeurs. Ceux qui taguent par passion se remarquent assez vite par le fait qu'ils dégradent quasiment jamais un spot de valeur pour les urbexeurs. Au contraire, ils ont souvent tendance à choisir de grands murs de béton dans les usines désaffectées. Cela donne de bonnes surprises à certains endroits. Au lieu d'explorer un immense local vide, vous trouvez plutôt :
Je me suis d'ailleurs toujours demandé si ce dernier n'était pas inspiré de Klimt :
- Les ferrailleurs illégaux : en gros, quand un internaute donne la localisation d'un spot, il faut compter quelques semaines avant qu'il ne soit totalement ravagé.
On reconnaît la trace des récupérateurs car ils sont très méthodiques : les murs sont détruits pour récupérer fils électriques et canalisations, les robinetteries et radiateurs ont disparu, ainsi que les cadres de portes. J'en ai déjà entendu à certains endroits, et ai préféré partir plutôt que de tomber nez à nez avec des individus en train de démolir les murs à la masse....
Certains bloggeur divulguent sans scrupules les adresses une fois qu'ils ont visité un spot.
Exemple : Le Manoir au piano, "d'origine" ;
Et ma 2e visite :
J'ai eu la chance de le visiter avant qu'il ne soit "connu". Il fallait alors plusieurs jours de recherche en croisant pas mal d'info. Le spot, même après plusieurs années d'abandon, était intact.
Puis, quelques semaines après, des "bloggeurs", se mettent à divulguer des indices. Par exemple, citer "gsv" dans le titre et les tags quand un internaute demande la localisation dans les commentaires. Il n'y a en gros qu'une seule ville correspondant à cet acronyme. C'est peut être une coïncidence, mais trois semaines plus tard, j'y suis retourné, tout avait été saccagé ou volé.
Ceux qui veulent voir l'évolution n'ont qu'à comparer les photos du piano avant/après. L'adresse a vite été connue, et il y a quelques semaines, ce manoir a presque entièrement brûlé.....
Un des sanatoriums alsaciens a été littéralement mis en pièce dès que le nom en a été divulgué sur youtube. Un second sanatorium semi-abandonné à proximité a pris les devants en murant l'ensemble de toutes les entrées.
Donc au contraire de la réputation des urbexeurs, décriée par la plupart des médias, il y plutôt des gens qui explorent par passion en prenant des photos, et des gens avec moins de scrupules qui pillent, mais tout le monde est mélangé dans le même sac.
Au niveau de la loi, c'est entre deux eaux.
Il y a des lieux formellement interdits, c'est écrit dessus, d'autres sont sous le coup de la loi car propriétés privés. Certains propriétaires sont plus "coulants" en ajoutant le panneau "à vos risques et périls".
Sommairement, ils ont un besoin de restriction pour à la fois éviter les voleurs, mais aussi les éventuelles poursuites de la part des imprudents (raison pour laquelle certains châteaux en ruines en Alsace sont maintenant inaccessibles).
Maintenant que j'ai présenté l'activité, je souhaite en venir aux points communs avec les situations de survie urbaine :
Cette manière d'être à cheval sur la législation fait vite prendre ses responsabilités. Vous êtes dans un lieu inhabité, souvent loin de la civilisation ou tout centre de soins. Si vous traversez de part en part plusieurs étages d'un bâtiment complètement délabré, c'est votre faute, et vous pouvez y rester pour ne pas avoir été assez prudent.
- Les lieux ne sont pas prévus pour s'y déplacer.
La plupart du temps, il s'agit de bâtiments construits avant les normes en vigueur actuellement. S'ils étaient construits à l'identique, ils seraient sans doute condamnés pour dangers en tous genres. Ils ont été abandonnés il y a de nombreuses années, il n'y a donc plus de maintenance ni d'entretien. Les routes, murs, sols et accès sont dégradés, dangereux et souvent prêts à s'effondrer.
Dans une situation de catastrophe (Katrina), d'inondation (assez fréquent en Europe), ou de conflit urbain (Yougoslavie) de on peut retrouver ce genre de points :
Il ne s'agit donc pas d'explorer en fonçant tête baissée. Bien au contraire, il faut analyser tous les éléments de l'environnement. Aussi bien les objets (sols, solidité, plafond, escaliers, passerelle métallique) que les êtres (maréchaussée pour les amateurs de lieux interdits), chiens errants, etc....
Un faux pas et le sol peut se dérober sous vos pieds.
Il y a donc le premier point de la règle des 3 : trois secondes sans attention.
La psychologie de groupe
Les situations les plus délicates sont les groupes. On fait visiter des endroits à des amis, cela ajoute en plus :
- la gestions et la formation rapide de personnes qui n'ont pas forcément conscience des dangers.
- le bruit supplémentaire (certains stressent à l'idée d'être dans un lieu abandonné; d'autres le prennent avec amusement en ne maitrisant pas leur voix ou leurs déplacements).
- la pratique différente du lieu. Un étage pourri ne pourra supporter le passage que d'un seul à la fois.
Certains se prêtent au jeu et vous écoutent, pour d'autres, vous regrettez chaque seconde de leur avoir proposé, mais vous devez gérer les conséquences pendant toute l'exploration.
Soins : Un point important.
A l'extrême rigueur, vous pourrez appeler les secours, qui vous sauveront, mais vous vous expliquerez après avec les forces de l'ordre et l'assurance ce que vous faisiez là.
En pratique, à moins d'un gros pas de bol, la prudence permet de ne pas s'égratigner trop fort.
Perso, je me suis pris quelques blessures, plus ou moins soignables avec les premiers secours.
- Écorchures en tous genre
- Tranchage du pousse sur des bris de verre.
- Empalage du pied sur une palette éclatée, dans le noir. Le clou rouillé a traversé ma chaussure de rando et la peau, les muscles et s'est arrêté dans l'os. On peut parler de blessure profonde bien que présentant un point d'entrée très petit. Je n'ai pas eu vraiment mal, mais ai remarqué l'importance après avoir laissé des traces de pas en sang.Le principal risque est l'infection profonde, ou une maladie tellurique comme le tétanos ou la gangrène, car le clou rouillé introduit les germes à sa surface (du sol donc) dans la plaie, mais aussi ceux présents sur votre chaussure, et votre flore commensale au niveau du pied.
Sur le moment et trois jours après, où l'on voit le derme se régénérer un peu. La cicatrisation a été contrecarrée par les premiers mouvements jusqu'à la voiture; ça a saigné dans tous les sens en se rouvrant à chaque foulée.
Perso, j'ai traité avec kit bobologie (compressif), désinfectant de plaie, recherche et détersion, puis pansement changé régulièrement avec suivi (je suis vacciné) en recherche de symptômes d'inflammation et septicémie. Mais si cela arrive à une personne un peu light au niveau des compétences médicale, c'est un cas qui mène éventuellement à l'hôpital, alors que quelques gestes réduisent beaucoup la plupart des risques.
Bien entendu, il y a pas mal de chances pour qu'il ne se passe rien du tout
J'ai donc une trousse de soins "tout venant" :
- un savon et une SHA : on est rarement propre à la fin d'une exploration.
- antiseptique : petites coupures sur des matières pas très nettes, ronces, etc.
- pansements : compressif, 1M à découper, petits en tous genres.
- steristrips, pour les coupures nettes et propres
- masque ffp3, pour certains lieux chargés en poussières (bibliothèque du manoir au piano par ex).
- paire de ciseaux, pince à épiler.
- antidouleur, antalgiques, antidiarrhéique (je suis en général contre, sauf utilisation exceptionnelle de courte durée).
- pastilles purificatrices : ne m'ont jamais servi dans ce cadre, mais "au cas où" si je dois rester bloqué sur place ou si je me perds malencontreusement dans une forêt.
- tire-tic, car ma région est infestée
- thermomètre.
- couverture de survie.
- un briquet
- une seringue vide stérile (percer des cloques, drainer) + liquide phy.
- Gants stériles.
- un sachet de sucre et de café.
- mouchoirs,
- lingette nettoyante.
Matériel :
Le matériel suit plusieurs impératifs : il doit être léger et permettre de se déplacer rapidement.
Un gros sac à dos est très pénible pour les recoins, ou escalader une passerelle.
ou passer sous les convois désaffectés
Qualité ou premier prix ?
Au niveau de l'éclairage, certains vont assez loin, avec des frontales Peltz et compagnie. Personnellement, j'utilise du très simple, léger et bon marché. La principale raison est que l'Urbex est une activité qui a tendance à utiliser à fond le matériel. On l'use dans des conditions limites (humidité), et il n'est pas rare de perdre plusieurs items. Genre, vous éclairez un puits, et "Oh, la lampe est tombée 20m plus bas !"
Par ailleurs, un matériel bon marché et low profile permet de l'avoir régulièrement sur soi sans passer pour un zinzin, ni avoir à s'en inquiéter et de l'utiliser si par hasard on tombe sur un endroit merveilleux.
C'est moins dommageable mentalement de perdre ou péter une lampe à 5€ qu'une Peltz. Cela permet des doublon, en cas de prêt en groupe.
Ici, mes deux lampes LED "stylo" de 1,5W....à 3€ pièce en Allemagne. Je les ai depuis plus d'un an avec une trentaine de sorties sans aucun souci. Elles sont suffisamment puissantes pour éclairer jusqu'au fond d'un couloir ou d'un puits, tout en étant très fines pour tenir entre deux doigts, entre le dents, ou se clipser quelque part. La mince ouverture permet également d'estomper avec un seul doigt en cas de bruit suspect.
- La lampe est alimentée par deux piles AAA. J'ai en plus un pack de 4, assurant au total 20h d'éclairage à forte puissance.
Divers :
En général une bouteille d'eau pour l'après midi. Un petit gouter lors de la pause pour une petite photo.
Deux paires de gants renforcés au kevlar, qui deviennent vite indispensables pour éviter les coupures systématiques.
Certains emporteront un appareil photo hors de prix pour tirer des photos de grande qualité. Je les comprends car certains endroits méritent d'être immortalisés. Personnellement, je préfère me contenter d'un smartphone 8 mégapixels, qui assure un bon compromis entre compacité et praticité :
- moins de risque de le casser qu'en transportant un appareil de 1kg
- léger
- possibilité de prendre d'une main, voire de se prendre avec la seconde caméra.
- fonctionne avec des gants de travail.
- certains gardiens autorisent l'accès si on ne prend pas de photos. L'astuce des urbexeurs est bien entendu de permuter les cartes mémoire pour en flasher une à la sortie, avec quelques photos dessus pour "faire vrai". Sur smartphone, personne ne soupçonne quoi que ce soit, et d'autant moins avec les applications sécurisant les dossiers photo.
- il fait lampe de secours.
Documentation :
L'activité pousse à se documenter sérieusement sur plusieurs points.
- le lieu et son histoire. Culturellement, on apprend beaucoup sur une région, une vallée ou un village rien qu'avec le lieu recherché car il s'agit souvent d'un point historique d'intérêt.
On remarque même souvent son évolution avec les comparatifs d'anciennes cartes postales présentes sur le web.
- On utilise énormément les données géographiques. Pour trouver certains spots, je suis passé par l'analyse de l'angle du soleil d'une photo selon l'heure de prise avec estimation de l'altitude de la montagne en fond. Si une rivière, une tour, ou un point remarquable apparaît, c'est souvent l'indice final d'une recherche. Cela force donc l'attention maximum au paysage.
- On utilise la cartographie, pour la recherche, mais aussi pour atteindre le spot. Autant google earth permet de trouver la zone, autant les zones d'entrées sont à évaluer sur une carte IGN précise.... en allant aux extrêmes, les bunkers fortifiés de Lorraine sont dignes de l'épreuve d'endurance, même avec des cartes.
Il y a dans ce cas une analyse souvent approfondie des cartes IGN : puits, rivières, espèce d'arbre.
En général, c'est un peu se retrouver en slip au milieu de la nature car en randonnée, autant vous pouvez demander votre chemin, autant en mode Urbex, vous ne pouvez compter que sur vous même !
Voilà, sans chercher à se mettre en danger (c'est le point principal), l'activité permet de tester dans de vraies conditions extérieures son matériel, ses compétences, et son mental.
N'hésitez pas à poser vos questions. Il y a pas mal de points qui mériteraient des développements, mais cet article est resté trop longtemps dans mes brouillons; j'ai dû promettre à certains membres de son édition dès juin, alors bon....
J'espère que l'activité vous aura attisé la curiosité, et peut être même donné l'envie de vérifier s'il n'y avait pas des lieux d'urbex près de chez vous
Cela faisait assez longtemps que je voulais poster un petit article sur les similitudes entre Urbex et situation de survie urbaine.
Qu'est-ce que l'Urbex ?
C'est le diminutif de Urban Exploration, l'exploration urbaine.
Il ne s'agit pas d'arpenter les villes en tongues, mais plutôt d'explorer les lieux abandonnés de notre civilisation. Les endroits à découvrir sont appelés "spots".
Il y a plusieurs motivations, je vais donner quelques unes des miennes :
- Il y a un énorme aspect historique. La plupart des lieux que j'ai visités sont chargés d'histoires. Que ce soient des hauts fourneaux métallurgiques de début 1900, des centres de traitement des tuberculeux en montagne, ou d'époustouflants manoirs du 19e, chacun a une âme, en aillant accueilli toutes sortes de personnes.
Exemple avec cette petite chapelle :
ou une partie de machinerie :
Ces lieux sont abandonnés, mais souvent très bien conservés tant qu'ils restent dans le secret. Ce sont donc presque des musées à ciel ouverts, perdus dans la nature. A ceci près qu'il ne s'agit pas d'une reconstitution, mais bien de lieux réels, authentiques, et abandonnés en l'état.
De nombreux spots ont ainsi été complètement figés à l'époque de leur abandon. Il n'est pas rare de trouver une pièce avec une atmosphère années 50, une salle du 19e tant sur les meubles, la tapisserie, voire quelques livres, des photos, ou même des écrits personnels !
- Les photos. J'apprécie les lieux anciens, par leur architecture, leurs matières (il y a peu de béton industriel), et leur façon de vieillir. Il y a parfois une atmosphère post-apo qui s'en dégage, dans le sens où il y a une complète liberté de déplacement, sans jugement de quiconque. Vous pouvez vous dire "Tiens, j'aimerais bien monter dans cette tour !" puis le faire la seconde d'après alors qu'en lieu civilisé votre envie restera imaginaire.
Certains apprécient les paysages naturels (moi aussi, hein), d'autres l'aspect rouillé, ou encore suivent le questionnement "Que reste-t-il de notre monde lorsque la nature reprend ses droits ?".
Les Urbexeur ont souvent une mauvaise image, car on les assimile à la dégradation, c'est faux pour ceux qui respectent une éthique communément admise : Il ne faut en aucun cas transformer le lieu, voler quelque chose, ou détruire ne serai-ce qu'un meuble ou une porte.
Ils ont en revanche pas mal d'homologues "explorateurs" qui s'en distinguent :
- les airsofteurs, qui trouvent dans les lieux abandonnés à la fois un terrain de jeu relativement "réel", et la tranquillité requise pour la journée.
La plupart du temps, cela se passe bien quand on se croise. De temps et temps, ils se montrent très dangereux car "on empiète sur leur terrain" (phrase véridique), et n'hésitent pas à orienter quelques tirs (sans protection) vers les urbexeurs pour les décourager d'approcher, j'ai eu un beau bleu dans le cou, et ça a été assez pénible de discuter après sans en venir aux mains.
- Les graffeurs. Ceux qui taguent par passion se remarquent assez vite par le fait qu'ils dégradent quasiment jamais un spot de valeur pour les urbexeurs. Au contraire, ils ont souvent tendance à choisir de grands murs de béton dans les usines désaffectées. Cela donne de bonnes surprises à certains endroits. Au lieu d'explorer un immense local vide, vous trouvez plutôt :
Je me suis d'ailleurs toujours demandé si ce dernier n'était pas inspiré de Klimt :
- Les ferrailleurs illégaux : en gros, quand un internaute donne la localisation d'un spot, il faut compter quelques semaines avant qu'il ne soit totalement ravagé.
On reconnaît la trace des récupérateurs car ils sont très méthodiques : les murs sont détruits pour récupérer fils électriques et canalisations, les robinetteries et radiateurs ont disparu, ainsi que les cadres de portes. J'en ai déjà entendu à certains endroits, et ai préféré partir plutôt que de tomber nez à nez avec des individus en train de démolir les murs à la masse....
Certains bloggeur divulguent sans scrupules les adresses une fois qu'ils ont visité un spot.
Exemple : Le Manoir au piano, "d'origine" ;
Et ma 2e visite :
J'ai eu la chance de le visiter avant qu'il ne soit "connu". Il fallait alors plusieurs jours de recherche en croisant pas mal d'info. Le spot, même après plusieurs années d'abandon, était intact.
Puis, quelques semaines après, des "bloggeurs", se mettent à divulguer des indices. Par exemple, citer "gsv" dans le titre et les tags quand un internaute demande la localisation dans les commentaires. Il n'y a en gros qu'une seule ville correspondant à cet acronyme. C'est peut être une coïncidence, mais trois semaines plus tard, j'y suis retourné, tout avait été saccagé ou volé.
Ceux qui veulent voir l'évolution n'ont qu'à comparer les photos du piano avant/après. L'adresse a vite été connue, et il y a quelques semaines, ce manoir a presque entièrement brûlé.....
Un des sanatoriums alsaciens a été littéralement mis en pièce dès que le nom en a été divulgué sur youtube. Un second sanatorium semi-abandonné à proximité a pris les devants en murant l'ensemble de toutes les entrées.
Donc au contraire de la réputation des urbexeurs, décriée par la plupart des médias, il y plutôt des gens qui explorent par passion en prenant des photos, et des gens avec moins de scrupules qui pillent, mais tout le monde est mélangé dans le même sac.
Au niveau de la loi, c'est entre deux eaux.
Il y a des lieux formellement interdits, c'est écrit dessus, d'autres sont sous le coup de la loi car propriétés privés. Certains propriétaires sont plus "coulants" en ajoutant le panneau "à vos risques et périls".
Sommairement, ils ont un besoin de restriction pour à la fois éviter les voleurs, mais aussi les éventuelles poursuites de la part des imprudents (raison pour laquelle certains châteaux en ruines en Alsace sont maintenant inaccessibles).
Maintenant que j'ai présenté l'activité, je souhaite en venir aux points communs avec les situations de survie urbaine :
Cette manière d'être à cheval sur la législation fait vite prendre ses responsabilités. Vous êtes dans un lieu inhabité, souvent loin de la civilisation ou tout centre de soins. Si vous traversez de part en part plusieurs étages d'un bâtiment complètement délabré, c'est votre faute, et vous pouvez y rester pour ne pas avoir été assez prudent.
- Les lieux ne sont pas prévus pour s'y déplacer.
La plupart du temps, il s'agit de bâtiments construits avant les normes en vigueur actuellement. S'ils étaient construits à l'identique, ils seraient sans doute condamnés pour dangers en tous genres. Ils ont été abandonnés il y a de nombreuses années, il n'y a donc plus de maintenance ni d'entretien. Les routes, murs, sols et accès sont dégradés, dangereux et souvent prêts à s'effondrer.
Dans une situation de catastrophe (Katrina), d'inondation (assez fréquent en Europe), ou de conflit urbain (Yougoslavie) de on peut retrouver ce genre de points :
Il ne s'agit donc pas d'explorer en fonçant tête baissée. Bien au contraire, il faut analyser tous les éléments de l'environnement. Aussi bien les objets (sols, solidité, plafond, escaliers, passerelle métallique) que les êtres (maréchaussée pour les amateurs de lieux interdits), chiens errants, etc....
Un faux pas et le sol peut se dérober sous vos pieds.
Il y a donc le premier point de la règle des 3 : trois secondes sans attention.
La psychologie de groupe
Les situations les plus délicates sont les groupes. On fait visiter des endroits à des amis, cela ajoute en plus :
- la gestions et la formation rapide de personnes qui n'ont pas forcément conscience des dangers.
- le bruit supplémentaire (certains stressent à l'idée d'être dans un lieu abandonné; d'autres le prennent avec amusement en ne maitrisant pas leur voix ou leurs déplacements).
- la pratique différente du lieu. Un étage pourri ne pourra supporter le passage que d'un seul à la fois.
Certains se prêtent au jeu et vous écoutent, pour d'autres, vous regrettez chaque seconde de leur avoir proposé, mais vous devez gérer les conséquences pendant toute l'exploration.
Soins : Un point important.
A l'extrême rigueur, vous pourrez appeler les secours, qui vous sauveront, mais vous vous expliquerez après avec les forces de l'ordre et l'assurance ce que vous faisiez là.
En pratique, à moins d'un gros pas de bol, la prudence permet de ne pas s'égratigner trop fort.
Perso, je me suis pris quelques blessures, plus ou moins soignables avec les premiers secours.
- Écorchures en tous genre
- Tranchage du pousse sur des bris de verre.
- Empalage du pied sur une palette éclatée, dans le noir. Le clou rouillé a traversé ma chaussure de rando et la peau, les muscles et s'est arrêté dans l'os. On peut parler de blessure profonde bien que présentant un point d'entrée très petit. Je n'ai pas eu vraiment mal, mais ai remarqué l'importance après avoir laissé des traces de pas en sang.Le principal risque est l'infection profonde, ou une maladie tellurique comme le tétanos ou la gangrène, car le clou rouillé introduit les germes à sa surface (du sol donc) dans la plaie, mais aussi ceux présents sur votre chaussure, et votre flore commensale au niveau du pied.
Sur le moment et trois jours après, où l'on voit le derme se régénérer un peu. La cicatrisation a été contrecarrée par les premiers mouvements jusqu'à la voiture; ça a saigné dans tous les sens en se rouvrant à chaque foulée.
- Spoiler:
Perso, j'ai traité avec kit bobologie (compressif), désinfectant de plaie, recherche et détersion, puis pansement changé régulièrement avec suivi (je suis vacciné) en recherche de symptômes d'inflammation et septicémie. Mais si cela arrive à une personne un peu light au niveau des compétences médicale, c'est un cas qui mène éventuellement à l'hôpital, alors que quelques gestes réduisent beaucoup la plupart des risques.
Bien entendu, il y a pas mal de chances pour qu'il ne se passe rien du tout
J'ai donc une trousse de soins "tout venant" :
- un savon et une SHA : on est rarement propre à la fin d'une exploration.
- antiseptique : petites coupures sur des matières pas très nettes, ronces, etc.
- pansements : compressif, 1M à découper, petits en tous genres.
- steristrips, pour les coupures nettes et propres
- masque ffp3, pour certains lieux chargés en poussières (bibliothèque du manoir au piano par ex).
- paire de ciseaux, pince à épiler.
- antidouleur, antalgiques, antidiarrhéique (je suis en général contre, sauf utilisation exceptionnelle de courte durée).
- pastilles purificatrices : ne m'ont jamais servi dans ce cadre, mais "au cas où" si je dois rester bloqué sur place ou si je me perds malencontreusement dans une forêt.
- tire-tic, car ma région est infestée
- thermomètre.
- couverture de survie.
- un briquet
- une seringue vide stérile (percer des cloques, drainer) + liquide phy.
- Gants stériles.
- un sachet de sucre et de café.
- mouchoirs,
- lingette nettoyante.
Matériel :
Le matériel suit plusieurs impératifs : il doit être léger et permettre de se déplacer rapidement.
Un gros sac à dos est très pénible pour les recoins, ou escalader une passerelle.
ou passer sous les convois désaffectés
Qualité ou premier prix ?
Au niveau de l'éclairage, certains vont assez loin, avec des frontales Peltz et compagnie. Personnellement, j'utilise du très simple, léger et bon marché. La principale raison est que l'Urbex est une activité qui a tendance à utiliser à fond le matériel. On l'use dans des conditions limites (humidité), et il n'est pas rare de perdre plusieurs items. Genre, vous éclairez un puits, et "Oh, la lampe est tombée 20m plus bas !"
Par ailleurs, un matériel bon marché et low profile permet de l'avoir régulièrement sur soi sans passer pour un zinzin, ni avoir à s'en inquiéter et de l'utiliser si par hasard on tombe sur un endroit merveilleux.
C'est moins dommageable mentalement de perdre ou péter une lampe à 5€ qu'une Peltz. Cela permet des doublon, en cas de prêt en groupe.
Ici, mes deux lampes LED "stylo" de 1,5W....à 3€ pièce en Allemagne. Je les ai depuis plus d'un an avec une trentaine de sorties sans aucun souci. Elles sont suffisamment puissantes pour éclairer jusqu'au fond d'un couloir ou d'un puits, tout en étant très fines pour tenir entre deux doigts, entre le dents, ou se clipser quelque part. La mince ouverture permet également d'estomper avec un seul doigt en cas de bruit suspect.
- La lampe est alimentée par deux piles AAA. J'ai en plus un pack de 4, assurant au total 20h d'éclairage à forte puissance.
Divers :
En général une bouteille d'eau pour l'après midi. Un petit gouter lors de la pause pour une petite photo.
Deux paires de gants renforcés au kevlar, qui deviennent vite indispensables pour éviter les coupures systématiques.
Certains emporteront un appareil photo hors de prix pour tirer des photos de grande qualité. Je les comprends car certains endroits méritent d'être immortalisés. Personnellement, je préfère me contenter d'un smartphone 8 mégapixels, qui assure un bon compromis entre compacité et praticité :
- moins de risque de le casser qu'en transportant un appareil de 1kg
- léger
- possibilité de prendre d'une main, voire de se prendre avec la seconde caméra.
- fonctionne avec des gants de travail.
- certains gardiens autorisent l'accès si on ne prend pas de photos. L'astuce des urbexeurs est bien entendu de permuter les cartes mémoire pour en flasher une à la sortie, avec quelques photos dessus pour "faire vrai". Sur smartphone, personne ne soupçonne quoi que ce soit, et d'autant moins avec les applications sécurisant les dossiers photo.
- il fait lampe de secours.
Documentation :
L'activité pousse à se documenter sérieusement sur plusieurs points.
- le lieu et son histoire. Culturellement, on apprend beaucoup sur une région, une vallée ou un village rien qu'avec le lieu recherché car il s'agit souvent d'un point historique d'intérêt.
On remarque même souvent son évolution avec les comparatifs d'anciennes cartes postales présentes sur le web.
- On utilise énormément les données géographiques. Pour trouver certains spots, je suis passé par l'analyse de l'angle du soleil d'une photo selon l'heure de prise avec estimation de l'altitude de la montagne en fond. Si une rivière, une tour, ou un point remarquable apparaît, c'est souvent l'indice final d'une recherche. Cela force donc l'attention maximum au paysage.
- On utilise la cartographie, pour la recherche, mais aussi pour atteindre le spot. Autant google earth permet de trouver la zone, autant les zones d'entrées sont à évaluer sur une carte IGN précise.... en allant aux extrêmes, les bunkers fortifiés de Lorraine sont dignes de l'épreuve d'endurance, même avec des cartes.
Il y a dans ce cas une analyse souvent approfondie des cartes IGN : puits, rivières, espèce d'arbre.
En général, c'est un peu se retrouver en slip au milieu de la nature car en randonnée, autant vous pouvez demander votre chemin, autant en mode Urbex, vous ne pouvez compter que sur vous même !
Voilà, sans chercher à se mettre en danger (c'est le point principal), l'activité permet de tester dans de vraies conditions extérieures son matériel, ses compétences, et son mental.
N'hésitez pas à poser vos questions. Il y a pas mal de points qui mériteraient des développements, mais cet article est resté trop longtemps dans mes brouillons; j'ai dû promettre à certains membres de son édition dès juin, alors bon....
J'espère que l'activité vous aura attisé la curiosité, et peut être même donné l'envie de vérifier s'il n'y avait pas des lieux d'urbex près de chez vous
Dernière édition par Métatarse le Mar 7 Oct 2014 - 20:28, édité 1 fois (Raison : Images redimensionnées)